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Boryana Petkova
Another point of you

(FR)

Tous ces yeux qui se posent sur elle et avec lesquels elle cherche désormais à composer façonnent l'armure ou le corset qui protège ou entrave les corps. Chaque correction de lunette agit comme une loupe qui amplifie ou distord la vue : l'augmente d'une singularité. Horizon de nos regards, les images en dégradé apparaissent telle une déclinaison de points de vue qui prisment le monde. Inclusive et abolissant les frontières culturelles du bien et du mal, son oeuvre flirte avec les tabous de nos sociétés en nous mettant face à des expériences limites, parfois illégales ou amorales. Ses images proviennent de moments anodins avec ses filles, de journée de travail ou de soirées mondaines, mais aussi de scènes rejouant son passé, alors que la drogue, la prostitution, la mendicité et le vol constituaient son quotidien, dans la banlieue de Sofia. Le flou incarne ce point de bascule, où le cerveau croit voir ou refuse l'évidence ce qui se joue devant lui. Car il revient à chacun·e de conserver sa position de classe, de consommateur·ice, du·e voyeur·ice ou, au contraire, de partager la somme de ces expériences extrêmes, fussent-elles confuses, fantasmées ou refoulées.

Tel un filtre sur la brutalité du réel, l'artiste bulgare, Boryana Petkova, performe son passé qu'elle rephotographie à travers les diverses corrections de verre, non pour le sublimer ou par nostalgie, mais pour en révéler les mascarades et intensifier les fictions qui nous constituent. De sorte que la photographie ne lui sert pas d'outil documentaire, mais de jeu optique et de superposition entre l'appareil photographique et psychique, le réel et la fiction, le voir et les regards. Elle traverse ainsi l'espace des apparences selon un partage de perspectives biologiques, machiniques, sociales, individuelles, conscientes ou inconscientes et, ce faisant, souligne les normes qui appareillent nos regards.

Boryana Petkova ne cherche pas à éclairer l'obscur, elle nous met face à nos propres préjugés et silences complices - straight in the eyes. Si bien que ce que nous voyons ne dépend, en réalité, que de ce que nous sommes.

 

Marion Zilio
Février 2024

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(ENG)

 

All those eyes that rest on her, and with which she now seeks to come to terms, shape the armour or corset that protects or constrains the body. Each correcting of vision acts like a magnifying glass that amplifies or distorts the vision, enhancing it with a singularity. As the horizon of our gaze, the gradient images appear as a range of viewpoints that look at the world through a prism. Inclusive and breaking down the cultural boundaries of good and evil, her work flirts with the taboos of our societies by confronting us with sometimes illegal or amoral borderline experiences. Her images are derived from carefree moments shared with her daughters, from her everyday work or a social event, but also from scenes in which she replays her past, when drugs, prostitution, begging and theft were part of her daily life in the suburbs of Sofia. The blurring embodies the tipping point where the brain either believes it sees, or refuses to accept, the evidence of what is happening in front of it. Because it is up to each of us to maintain our status as members of a class, consumers, voyeurs or, on the contrary, to share the sum total of these extreme experiences, be they confused, fantasised or repressed.

 

As though putting a filter on the brutality of reality, the Bulgarian artist Boryana Petkova performs her past, which she re-photographs through various correction glasses, not to sublimate it or out of nostalgia, but to reveal its masquerades and intensify the fictions that constitute us. This means she uses photography not as a documentary tool, but as an optical play through which she superimposes the camera and the psyche, reality and fiction, seeing and looking. By crossing biological, mechanical, social, individual, conscious or unconscious perspectives, she tears the veil of appearances, and in so doing highlights the norms that rig our gaze.

 

Boryana Petkova does not seek to illuminate the obscure; rather, she confronts us with our own prejudices and complicit silences ? and does so looking us straight in the eyes. So much so that, in reality, what we see depends exclusively on what we are.

 

Marion Zilio
February 2024


Photo credits: © Audrey Jonchères | Nosbaum Reding

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